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posterIN WATER (물안에서)

IN WATER (물안에서)

un film de Hong Sangsoo
Corée du Sud - 2023 - 61'
SUISA 1021.471
date de sortie: 30.10.2024

Sur l’île rocheuse de Jeju, un jeune acteur réalise un film. Alors que l’inspiration lui manque, il aperçoit une silhouette au pied d’une falaise. Grâce à cette rencontre et à une chanson d’amour écrite des années plus tôt, il a enfin une histoire à raconter.

Un geste artistique iconoclaste

« Un geste artistique iconoclaste, à l’ère de la haute définition numérique. Pas gratuit pour autant, car ce parti pris fait sens. Les images du film sont aussi floues que le projet de son protagoniste, jeune acteur qui a convoqué une comédienne et un cameraman pour réaliser un court métrage, mais cherche encore l’inspiration! Alors que le trio déambule sur l’île de Jeju, elle viendra d’une rencontre… Hong Sang-soo évoque ici sa propre méthode, dans un de ces récits brefs (une heure) et minimalistes dont il a le secret. Où les dialogues et les situations, a priori anecdotiques, ouvrent sur des abîmes existentiels.» — Mathieu Loewer, Un charme flou, Le Courrier

Beau comme un tableau de maître

« Le Coréen Hong Sang-soo ose l’inconcevable d’un film délibérément flou. In Water est un essai beau comme un tableau de maître. Difficile pour nous d’imaginer la réaction d’un spectateur ou d’une spectatrice néophyte devant ce 29e long métrage (tout juste, d’une durée de 61 minutes). Mais après tout, on peut bien tomber amoureux d’un écrivain, d’un peintre ou d’un compositeur devant une de ses œuvres tardives. La difficulté avec Hong Sang-soo est que bien peu de gens savent encore que le cinéma est aussi un art et que In Water contrevient délibérément à toutes les règles communément admises d’un «bon film». Jamais sans doute Hong n’avait osé une mise en abyme plus nette que dans ce film flou, à la fois grand geste paysagiste (le décor s’en trouve transfiguré), discours de sa méthode (ses films sont de plus en plus libres et improvisés) et déclaration intime (d’une mélancolie ici quasi-suicidaire). Il suffit de constater au générique qu’il cumule à présent les fonctions de réalisateur, scénariste, producteur, chef opérateur, monteur et même musicien pour s’en convaincre. » — Norbert Creutz, la limpidité du flou selon Hong Sangsoo, Le Temps

Comme Marguerite Duras : aller à l’essentiel

« In Water est un film qui parle de choses sérieuses sans jamais se prendre au sérieux. Le spectateur est entraîné dans un balade contemplative où il respire les paysages marins brouillés et prend attache avec ces trois jeunes gens qui se mentent à eux-mêmes.comme Ce qui frappe, c’est le dénuement total auquel se résout le réalisateur. On pense ainsi à l’aboutissement de grands artistes comme en littérature Marguerite Duras ou en peinture Pablo Picasso, qui, en fin de carrière, allaient à l’essentiel de leur art et refusaient toute forme de surenchère esthétique. Le film témoigne ainsi d’une maturité profonde de l’œuvre de Hong Sangsoo qui va droit au cœur de ses spectateurs. » — Laurent Cambo, In Water est un petit joyau de poésie, à voir à lire

Une révélation esthétique, ce que ce plan final, après un panoramique bouleversant, accomplit en des proportions cosmiques

« Le jeune Seoungmo a quelque chose à dire. Quoi ? Il ne le sait pas. Mais il sait comment : en réalisant un film. Pour le mettre en œuvre, il a dépensé ses maigres économies constituées à coups de jobs d’été pour partir deux jours avec deux complices dans un calme village du bord de mer, hors saison. Il avait une idée, qu’il a abandonnée, mais il va faire ce film « pour l’honneur ». Tous les trois marchent, regardent, discutent, et finalement la vérité saisit Seoungmo : son film était déjà là, peut-être même qu’il l’avait déjà formulé, quand il avait écrit une chanson en guise de cadeau pour une ancienne amoureuse. Il ne lui reste qu’à le filmer, ce qui veut dire le vivre. Léger détail : sauf la brève scène d’arrivée du trio à l’appartement qu’ils ont loué, tout ce que nous voyons est flou. Seoungmo se rend compte que le sens de son film résidait dans une chanson offerte et dont il demande l’autorisation de l’utiliser comme bande-son (« Bien sûr, c’est toi qui l’as écrite, c’était une belle chanson, mais elle est très triste »), on découvre qu’il s’agit tout simplement de la mélodie composée par Hong Sangsoo lui-même, celle qui ponctuait jusqu’ici de sa mélancolie répétitive la beauté d’In Water. Au moment de l’utiliser, avec une technique toute hongienne (il la reproduit sur son téléphone, plaçant celui-ci à côté de la caméra), on comprend que celle-ci comportait des paroles : « Connais-tu l’homme venu d’une terre lointaine qui a nagé vers la mer ? C’est un homme qui n’a jamais connu correctement l’amour. Qui ne voit pas que son beau cœur se fane à cause de tout ce temps de solitude. » Fait surprenant par rapport à cet accablement, In Water est bien un film solaire. Le chromatisme naturel de la mer, le ciel, les fleurs, le fleuve, les poissons et tous les êtres filmés par Hong contrastent avec le filtre que lui appose son choix du flou, cette translucidité limitée, avant qu’on ne l’accepte telle quelle, comme une surface. Se produit alors une révélation esthétique que seuls Branca de neve de Monteiro ou L’Homme atlantique de Duras avaient atteint dans le cinéma narratif.  (..) C’est ce que le plan final, après un panoramique bouleversant, accomplit en des proportions cosmiques dignes de la fin de L’Homme qui rétrécit de Jack Arnold. Seoungmo et Sangsoo affirment alors l’engagement le plus radical possible d’un cinéaste envers son art : il faut filmer ce qu’on vit et vivre ce qu’on filme. Jusqu’à la disparition. » — Fernando Gonzo, Cahiers du Cinéma

1h01 hors du temps et de l’espace, 1h01 vertigineuse et sublime

« C’est aussi une histoire de fantômes, son propre fantôme qui surgit à la face de l’actrice pour lui souffler un sublime « Reprends tes esprits », comme un appel d’outre-tombe de HSS à lui-même. Puis ces quelques notes de piano qui concluent 1h01 hors du temps et de l’espace, 1h01 vertigineuse et sublime. » — Pierig Leray, Le Bonbon 4,5/5

Encore plus mélancolique qu’à l’accoutumé

« À la manière d’Ozu, des plans de paysages viennent d’ailleurs ponctuer la narration à plusieurs reprises, comme autant de tableaux impressionnistes parfois accompagnés de quelques notes de guitare heurtées. C’est à cet endroit que le film épouse finalement une perspective analogue à celle qui travaille souterrainement les derniers films du Coréen : accueillir la beauté banale de ce qui se trouve juste sous nos yeux, pour répondre à la hantise de la mort et de la maladie. Elle se révèle toutefois encore plus mélancolique qu’à l’accoutumé, en cela qu’elle s’accompagne d’une mise à distance solitaire. Le sublime plan final d’In Water offre ainsi un envers déchirant au petit film qui clôturait La Romancière. » — Robin Vaz, Critikat

Tout droit sorti du grenier de Daniel Johnston

« Sa musique lo-fi, apparemment enregistrée sur cassette (on entend dans le film le clic caractéristique du magnétophone) semble tout droit sortie du grenier de Daniel Johnston. Difficile, tandis que le piano succède à la guitare, de ne pas céder au charme de l’un des plus beaux plans finaux de toute la carrière de Hong. Une nouvelle pierre particulièrement mélancolique s’ajoute à l’édifice hongien, plus que jamais sensible et singulier. » — Marin Gérard, Critikat

Quelque chose s’efface

« Les contours du monde ne s’estompent pas sans réveiller un fond de mélancolie, soutenu par la ritournelle désolée qui se met à résonner par moments, comme sortie d’un vieux magnétophone. Quelque chose s’efface, tout comme se dénouent les liens entre Seongmo et ses deux coéquipiers, qui profitent de ses errements pour convo­ler ensemble.  A l’arrivée, ce héros esseulé se destine lui-même à disparaître dans ses propres images comme englouti par une tache de couleur. Et si In Water n’était en définitive que cela : un film embué, car tout simplement vu à travers le prisme des larmes ? » — Mathieu Macheret, Le Monde, À NE PAS MANQUER

Radicalité d’Hong Sangsoo

« Des personnages ont pu se débattre face à une absence de sens et d’idéal, espérer une certitude ou une sécurité, comme le faisait encore Byungsoo dans Walk up, soucieux de la solidité des rambardes et touché par une douteuse vision divine. Mais à cette façon de se débattre avec le réel, Hong Sangsoo a de plus en plus opposé une ouverture sensible au monde, déjà éprouvée plusieurs fois face à la mer, comme avec la baignade finale d’Introduction (2021). Comme s’il s’agissait, flou à l’appui, d’écarter enfin les fantômes qui pèsent sur les épaules des personnages, le plan final s’apparente moins dans sa force plastique à une avancée mortifère dans la profondeur qu’à une dilution. Le corps de Seongmo s’accorde au monde, l’un et l’autre fondus dans l’image. Irrésolution de l’existence et du récit dépassée dans la dissolution : l’histoire dans In Water est emportée par des impressions composées par le cinéaste, par cette vision finale qui parachève un mouvement du personnage et du regard. On peut se demander s’il y a dans le fait d’imposer des images floues une forme de radicalité. Peut-être, mais, plutôt que du côté de la maîtrise, la radicalité d’Hong Sangsoo se situe du côté du défaut, de la déprise de vue. Seungmo dit au moment d’évaluer la ruelle qu’elle est parfaite, car pas trop belle. Nul doute que cette position est aussi celle d’Hong Sangsoo, qui travaillle avec In Water à nous faire voir et apprécier un peu mieux le monde : en apprenant à se tenir à la surface. » — Romain Lefebvre, AOC

Un monde que nous ne pouvons pas voir

« Le méta-film devient aussi bien une restitution du laboratoire hongien, tant sa méthode de travail est mise à nu (finir l’ébauche d’un scénario le jour du tournage, prendre une caméra et une poignée d’acteur·rices fidèles, se rendre dans un lieu, chercher un cadre et les placer à l’intérieur de celui-ci), qu’un matériau théorique et réflexif sur l’image de cinéma et sa captation. “Je pense qu’il existe un monde que nous ne pouvons pas voir”, affirme un des personnages. Chez Hong Sang-soo, il n’y a que le cinéma pour capturer ce royaume de l’indicible. » — Ludovic Béot, film méta envoûtant sur la création, Les Inrockuptibles

The New Yorker Interview

Hong Sangsoo Knows if You’re Faking It

The prolific Korean director talks about sincerity, Cézanne, and the nature of reality.