« Par sa constante inventivité formelle, le film en impose. Rarement Israël avait-il aussi bien donné à voir, avec ses contrastes extrêmes, l'enlaidissement fatal de ses paysages. Le déroulé en trois temps s'avère aussi intelligent qu'efficace, avec sa gueule de bois et son vague à l'âme après la fête d'indépendance - Fellini toujours. Oui montre bien ce qu'il faut. C'est le cri de rage et de désespoir d'un artiste courageux, qui pense autrement que la majorité. Un film qui compte et qui restera. » Norbert Creutz, Le Temps
« C'est une débauche de trahisons, de renoncements, d'humiliations imposées aux autres et à soi-même. Le nouveau film de Nadav Lapid met en scène un jeune couple dans une société israélienne traumatisée par le 7-Octobre, bombardant la bande de Gaza et rêvant de la raser. Son film est une énorme gifle. » Luis Lema
Luis Lema, entretien avec Nadav Lapid, Le Temps
« Comment aujourd’hui, en tant que cinéaste israélien, filmer la réalité de son pays ? Nadav Lapid prend le parti pris de filmer, en trois chapitres, l’acquiescement à l’horreur plutôt que le massacre. Il laisse, à l’instar de La Zone d’intérêt de Jonathan Glazer en 2023, la barbarie presque uniquement en hors-champ. (...) Un geste cinématographique radical, profondément politique et courageux. En affrontant frontalement l’aveuglement et l’obscénité de sa propre société, le cinéaste israélien contribue, par sa voix, à faire exister un débat indispensable sur ce qui se passe à Gaza. »
➣ « En tant que revue, Ciné-Feuilles refuse de museler l’art cinématographique. Notre rôle n’est pas d’ériger des cordons sanitaires autour des films. Nous restons fidèles à notre mission: faire résonner - avec exigence et nuance - les visions qui éclairent les écrans, même quand ces lumières bousculent nos certitudes. »
Luca Palumbo et ➣ L'édito d'Émilie Fradella - Boycott ?, Ciné-Feuilles
« Un grand film, sur le fond comme sur la forme. » ★★★★★ (Ouest France)
« Le cinéma de l’impossible, voilà à quoi travaille brillamment et radicalement Nadav Lapid, dans une mise en scène virevoltante, éblouissante, ultra sensorielle. » ★★★★★ (Bande à part)
« On ne peut pas faire un tel film, si vitalement enragé, si vigoureusement en colère, en prenant des pincettes. Et Lapid ne craint pas d’aller du côté de l’excès carnavalesque, en particulier dans la représentation des fêtes orgiaques où se côtoient nouveaux riches et mécènes plus ou moins mafieux. Cet aspect outré, grotesque, est un moyen d’atteindre la réalité au cœur. » ★★★★★(Cahiers du Cinéma)
Critiques Presse, Note moyenne 4,1, Allociné
« Oui se présente comme un kaléidoscope de séquences qui traversent littéralement l’écran, qui nous tombent sur la rétine, un peu comme une population éprouverait l’avènement d’un conflit guerrier qui lui tomberait dessus. Lapid tente de contextualiser son récit en nous faisant ressentir cette gamme de sentiments et d’impressions par définition inconnus. En même temps, sa mise en scène s’efforce aussi de donner un ordre au chaos, ce que viendrait symboliser ce nouvel hymne. La folie hallucinatoire qui domine durant près de deux heures trente peut s’assimiler à un uppercut. Un très grand film.»
Pascal Gavillet, Tribune de Genève
« Déjà avant le 7-Octobre, la valeur du sang des Palestiniens n'était pas extrêmement haute en Israël, rappelle-t-il. Mais le 7-Octobre a légitimé des tendances qui existaient bien avant. Ça a décomplexé le pire racisme et ça a donné une permission aux pulsions les plus noires. Et surtout à ce rêve qui existait depuis des années de se débarrasser une fois pour toutes des Palestiniens. Nadav Lapid espère que son film pourra avoir un réel impact: Avec tout son bruit, sa fureur, sa musique, ses couleurs, ses mouvements de caméra, je pense que c'est un film qui peut faire beaucoup plus qu'observer ou témoigner. Je pense que c'est un film qui est fait pour secouer des âmes, donc j'espère qu'il y arrivera. Je crois que 'Oui' montre une telle foi en la force et la beauté du cinéma, à la force des gestes, à la capacité de l'art de répondre d'une quelconque manière à l'horreur, d'être au même niveau de folie, que dans ce sens-là, étrangement, ce film fou, parfois désespéré, est aussi un film optimiste, conclut-il. »
Sujet de Julie Evard, entretien par Jennifer Covo, RTS
« Bien sûr, il est question d’Israël, de Gaza, de pouvoir et d’impuissance, de colère et de vengeance, et aussi de désarroi. Mais tout cela résonne avec notre monde dans sa globalité. Les rebelles prosaïques des précédents films de Nadav Lapid – les petits résistants, les artistes, les enfants, les rêveurs – ont ici laissé place aux résignés, aux opportunistes, à ceux qui tentent de transformer leur impuissance en une source d’énergie. Oui est un film sauvage, désespéré, exubérant – d’un point de vue formel également, ponctué de ruptures et d’écarts stylistiques audacieux. La musique, de Bach à Thelonious Monk en passant par Elvis, y est utilisée avec à propos. Il s’agit d’un film débordant de vitalité au seuil de la mort. Et en même temps, en ce qu’il reprend la trame du roman à clé de Klaus Mann Mephisto – l’histoire d’un artiste de génie qui ne peut s’empêcher de se mettre au service du pouvoir – il est d’une simplicité effrayante.
Nous vivons depuis longtemps au cœur d’un dilemme global, d’un insoluble conflit qui s’étend bien au-delà d’Israël. Oui ne prétend nullement apporter des réponses ou clarifier quoi que ce soit. Mais le film capte le chaos émotionnel ambiant, nous rappelant notre humanité – et celle des autres. Cela n’a rien de réconfortant. Mais c’est, contre toute attente, salutaire. »
Michael Sennhauser, Une folie lucide, sennhausersfilmblog
« Le cinéaste israélien exilé à Paris Nadav Lapid voulait faire un cri autour de la société humiliée de son pays. Avec Oui, il livre un hurlement halluciné, organique, musical et itératif. Mais son film secoue, à l’image, hier, du théâtre politique, satyrique et bouffon de son compatriote dramaturge Hanoch Levin. »
Bertrand Tappolet, Israël danse sur un volcan, La Pépinière
« Le film définitif sur l’après-7 Octobre. Une fiction stroboscopique, avec une idée par séquence et une énergie diffuse qui transforme le film en essai philosophique explosif. Tel est du moins ce que nous écrivions il y a quelques mois au Festival de Cannes, après la découverte du film en Quinzaine des cinéastes et non en compétition, qu’il aurait amplement méritée. L’enthousiasme n’est pas retombé. »
Pascal Gavillet, 24 Heures
« Le réalisateur signe une cinglante radiographie de la société israélienne. »
Mathieu Loewer, Nadav Lapid, âme noire du cinéma israélien, Le Courrier
« Le film est vraiment très courageux politiquement et même artistiquement, cette idée que le cinéma ce n’est pas l’art du différé mais que ça peut vraiment être un mode d’intervention dans le présent, il y a une idée vraiment très très haute du cinéma qui est renverrée disons de Chaplin à Rossellini, il y a vraiment quelque chose de cet ordre là dans ce qu’il veut faire. »
Jean-Marc Lalanne, Le Masque et la Plume
« Israël, là où Nadav Lapid a vécu et grandi, a fini par devenir au fil des années son pays ennemi, tant sa politique guerrière heurte sa conscience. Le Genou d’Ahed (2021) était déjà une déclaration ardente de désamour. Oui la prolonge sous une autre forme, carnavalesque, frénétiquement décadente, avec l’obscénité de la soumission comme thème moteur. Manège étourdissant dans les cercles du pouvoir, Oui reflète les dérives ahurissantes d’Israël mais aussi sans doute d’autres démocraties en péril. Le film fait l’effet d’une claque glacée, parfaite pour sortir de notre torpeur. »
Les films les plus attendus de la rentrée, Télérama
« Le cinéaste israélien Nadav Lapid pose avec son film Oui un regard acéré sur le malaise de son pays. La folie se déchaine sur l’écran dans un film nihiliste, orgiaque, porté par une caméra frénétique, en liberté, radicale et furieuse. Des âmes damnées, dérisoires, se contorsionnent dans leurs turpitudes. Pour ignorer l’horreur à portée d’horizon.
Ce film est farouche, pas commode. Violent pour de vrai, dans l’esthétique et dans le propos puisqu’il pointe notre barbarie, intime et collective. C’est un film qui va au bout de son propos, quitte à insister, quitte à s’étirer, quitte à tester notre résistance. Dire oui à tout, c’est se confronter à l’insoutenable et arrêter de fuir.
On a besoin de son imprudence, de son engagement, de sa colère. Tout ce qui maintient le cinéma vivant. »
Nicolas Houguet, Filmer Israël face à son génocide, Blast
« Comment répondre au 7 octobre par les moyens du cinéma ? Nadav Lapid reprend la confusion générale à son compte et la retourne à tous les envoyeurs avec une violence transformée en rage : la tragédie n’aura pas le faux-privilège de devenir un film-sujet, biopic américain avec happy ending ou documentaire en 6×52’, elle est un événement qui frappe le quotidien de tout le monde, bouscule les équilibres précaires trouvés au sein même du couple. »
Grégoire Benoist-Grandmaison, Trop c’est trop, Tsounami
« Fulgurant, grotesque, tragique, hilarant, bouleversant, convulsif, dialectique. Les mots manquent et abondent à la fois pour décrire Oui, du cinéaste israélien Nadav Lapid. Enchaînant à un rythme effréné les séquences d'une folle variété qui évoquent Sorrentino, Herzog, Ostlund et surtout Godard, le film surprend sans cesse, entre l'introspection, l'autoportrait de l'artiste en clown, l'histoire d'amour (deux femmes, comme deux vies possibles), le lyrisme, la colère, sans oublier l'amour paternel. Comment dire « oui » à la vie sans dire « oui » à tout ? Un grand film, gorgé d'énergie dionysiaque, sur la société du spectacle, la violence de vivre en Israël aujourd'hui, et la beauté de vivre tout court. »
Marguerite Baux, Elle
« Comment faire du cinéma sous le fascisme, sous l’horreur ? La question n’est pas théorique ou historique mais urgente, surtout pour un cinéaste israélien filmant son pays, après le 7 Octobre, responsable de l’anéantissement de Gaza et du massacre de ses habitants. "J’ai fait un film dans le pays de l’ennemi, qui est ce que mon pays est devenu", déclarait Lapid lors de la première projection à la Quinzaine des cinéastes.
Pour un réalisateur aussi ambitieux et en pleine possession de ses moyens que Lapid, auteur de quatre précédents longs métrages s’attaquant déjà violemment au nationalisme et au devenir autoritaire de son pays (Synonymes, ours d’or à Berlin en 2019, Le Genou d’Ahed, prix du jury à Cannes en 2021), la question de la possibilité d’un film sous le fascisme, tourné parmi les méchants, est une question de mise en scène, de solutions formelles à une situation hostile, irréconciliable. Son cinéma habitué aux morceaux de bravoure esthétiques et politiques n’était sans doute jamais allé aussi loin dans la rébellion survoltée qu‘avec ce film volontairement rebutant, épuisant, jusqu‘au-boutiste et pas dénué de courage.
Qu’un tel étalage de virtuosité, qui en deux heures et demie nous aura autant échaudés que refroidis pour nous laisser totalement exsangues, n’ait pas obtenu sa place en compétition officielle laisse planer un désagréable soupçon de lâcheté sur le Festival. A l’heure où les voix dissidentes israéliennes sont inaudibles, une charge venue de l’intérieur contre les errances d’une société ultra-violente et assoiffée de vengeance aurait pu réaffirmer le fameux rôle de veilleur du cinéma, si souvent revendiqué en ces lieux. (...)
Comment être Israélien aujourd’hui ? Le film se termine sur un départ, seule issue sans grand espoir. Les histoires amoureuses dans le film (la menace de séparation avec Yasmin, l’au-revoir renouvelé à l’ex et à l’innocence de l’enfance) valent pour diagnostic historique, de fin d’une histoire et de l’idée d’un pays, et autobiographique, d’adieu de Nadav Lapid à Israël. «Vous êtes durs à aimer», lance Y. à ses compatriotes, dans un film important qui en ceci leur ressemble. »
Luc Chessel et Elisabeth Franck-Dumas, Libération
«Il y a, depuis le 7-Octobre et l'écrasement méthodique des Palestiniens, un nombre significatif de films sur la situation dans la bande de Gaza et d'autres qui évoquent ce qui se produit aussi en Cisjordanie. Il n'y avait pas, à ce jour, de film sur Israël, sur le pays et le peuple qui commettent ces crimes. En cela, autant que par la singularité électrique d'une mise en scène furibarde, Oui occupe une place unique et nécessaire. »
Jean-Michel Frodon, "Oui", description d'une défaite, Slate
Délirant en tout point, l'horreur vu de l'intérieur. La folie de ce régime résumé en 2h30. ★★★★ Enfin du Chaos du vrai à Cannes avec Ken (Oui) de Nadav Lapid. Un film d’adieu à Israël, de détestation de soi (la figure de l’artiste entre clown et prostituée) avec la barbarie à Gaza omniprésente, partout, insoutenable. Ça commence en satire pour virer en cauchemar total.★★★★1/2 La fameuse formule de Godard est encore confirmée : l'Israël ne peut qu'être du côté de la fiction (même le found footage de l'hymne génocidaire, malgré son existence réelle, ressemble à une fiction, un mythe), la Palestine du côté du documentaire. Champ et contrechamp. Frontière infranchissable même quand les deux extrêmes se rencontrent dans un même plan. Un mode d'existence : la capacité de parler, de regarder, de balayer la tête dans tous les sens ou entre deux pôles (oui et non, "Juifs et non-Juifs", etc.), et l'incapacité de voir (l'autre), de dire (non).★★★★ Un film furieux, une tragédie musicale qui expose sans filtre la barbarie ordinaire. ★★★★
Reviews of Yes (2025), Letterboxd
« Beaucoup de gens, en France et dans le reste du monde, qualifient le film d’excessif, de surréaliste, mais je pense que pour des spectateurs israéliens, c'est du néoréalisme. Eux se voient dans un miroir. Il n’y a pas un millimètre de distance entre eux et ce qu’ils voient sur l’écran. En cela, Oui remplit une fonction de représentation, qui est, selon le réalisateur, sa seule puissance politique : il faut que les Israéliens se voient sous une lumière crue et cruelle, qu’ils voient ce que l’on est et ce qu’on est en train de commettre et ce qu’on est devenus. »
Nadav Lapid, cinéaste: "Il faut que les Israéliens se voient sous une lumière crue et cruelle", France Culture